Il existe au Japon un jeu de cartes très populaire, né au XVIe siècle, appelé hanafuda. Un jeu où il n’y a ni roi ni reine, mais des iris, des cerisiers et des saules ; et aussi des poèmes et des légendes, comme un herbier merveilleux de fleurs et de plantes révélant tout un réseau de paysages et de références littéraires.*
Février est un paysage en blanc et noir, comme une onde de neige dans les traits calligraphiés des branches de prunier. […] Les poètes l’associent à la neige, à l’aube naissante, au teint poudré d’une jeune fille […]. Fleur des calligraphes et des poètes, tous épris d’encre de Chine et de neige, le prunier sait aussi annoncer, comme le rossignol uguisu, auquel il est associé dans de nombreux poèmes, les couleurs vives du printemps proche.**
…
Un voyage à travers les fleurs et leur signification au Japon, de-ci de-là ponctué de poèmes.
Si le jeu en lui-même semble difficile d’accès car nous manquons de références, tu apprécieras sûrement les images délicates et surtout les explications détaillées des différents thèmes pour qu’un jour, pourquoi pas, le hanafuda fasse partie de tes jeux lors de dimanches pluvieux !
Dans un autre registre, cet ouvrage peut aussi venir alimenter ton herbier imaginaire et symbolique qui viendra enrichir tes haiku…
Au plaisir de lire tes commentaires!
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*BRINDEAUVéronique, “Hanafuda, le jeu des fleurs”,quatrième de couverture, extrait, éditions Philippe Picquier, 2014.
Bon, ok , c’est pas une roue, mais l’essentiel est là!
Tu es en panne d’inspiration?
Tu n’arrives pas à choisir un kigo ?
Tu veux un peu de fun dans ta vie ?
Bam, voilà une petite joie à ajouter à ta liste aujourd’hui!
Mode d’emploi
Fais une capture d’écran (ou une photo avec ton téléphone si tu ne sais pas ce qu’est une capture d’écran…) de ma petite animation ci-dessous pour découvrir le kigo à utiliser aujourd’hui !
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L’idée te plait?
Découvre ma boite à outils spécial écriture de haiku!
Le principe?
Des jeux, des défis, des explications et des exercices concrets pour réellement comprendre et intégrer les notions recherchées dans tout bon haiku qui se respecte (dixit Bashô) :
les mots de césures
la recherche de la simplicité
la maîtrise de la suggestion (au détriment de la description)
la légèreté
l’humour
la confrontation de l’immuable et de l’éphémère
etc.
Une fois que tu t’es procuré la boite à outils, tu y auras accès indéfiniment ainsi qu’à toutes les mises à jours (et nouveautés).
Oui, je sais. Ça fait mal. Et tu veux pas le savoir.
Mais la réalité c’est qu’un haiku dans sa forme classique (celle à laquelle tout le monde pense quand tu dis “haiku”), c’est une métrique 5-7-5, c’est un kigo, c’est un mot de césure. POINT.
Pour t’aider à comprendre le principe, pose-toi la question de savoir si un alexandrin qui fait 14 syllabes, c’est toujours un alexandrin? Parce que pour un haiku c’est pareil. Attention, si tu ne respectes pas la métrique…
… ça ne dénigre aucunement tes poèmes, ta créativité, ton écriture ou ton statut d’écrivain et poète.
C’est juste que tu n’écris pas un haiku, et c’est pas grave.
Maintenant que le sparadrap est enlevé, je vais nuancer et te réconcilier avec l’idée d’écrire un poème court qui n’est pas forcément un haiku ou écrire un haiku qui n’est pas “classique”. Let’s go!
Pourquoi 5-7-5 d’abord?
Il existe deux raisons fondamentales pour lesquelles la métriques 5-7-5 est attachée à la forme du haiku : l’héritage historique et la raison même de l’écriture de haikai (ancêtre du haiku).
Premièrement, l’héritage poétique. Cette métrique basée sur un enchaînement de pentasyllabes et d’heptasyllabes est un héritage de la poésie classique japonaise. En réalité, toutes les formes poétiques japonaises utilisent principalement ces deux mètres de 5 et 7 syllabes.1 La forme la plus connue reste le tanka, soit 31 syllabes selon la métrique 5-7-5/7-7.
Deuxièmement, le haikai-rengaet son importance dans l’évolution de la forme du haikai.
Là je te propose un petit récapitulatif de l’histoire du haiku afin de comprendre tous les termes (haikai, hokku, haikai-hokku, haikai-renga, tanka, …) :
le haikai : 5-7-5 + kigo + mot de césure, époque Edo (1603-1868), Bashô, Buson, Issa.
le haiku : 5-7-5 + kigo + mot de césure, époque Meiji (1868-1912), Masaoka Shiki, Natsume Sôseki.
Le haikai-renga était la principale raison d’être de la forme du haikai écrit par Bashô, Buson ou Issa à l’époque Edo (1603-1868). C’est l’ancêtre du haiku (nouvelle définition proposée par Masaoka Shiki à l’ère Meiji (1868-1912)). Un haikai c’est 5-7-5, un kigo et un mot de césure, mais à la différence du haiku de Shiki (écrit par un poète solitaire, selon l’image occidentale de la figure du poète, qui écrit seul pour lui-même), le haikai était un poème destiné à faire partie d’un tout, était destiné à être utilisé lors de réunion de poètes : c’est ce qu’on appelle un renga.
A l’origine du haikai-renga on a le renga (époque Heian). C’est quand plusieurs poètes se rencontrent (de 2 à 100 selon les occasions…) et composent des poèmes tanka (5-7-5/77) enchaînés. Voilà ce que ça donne:
premier poète (souvent l’invité d’honneur ou l’hôte de la réunion) compose un tanka 5-7-5 /7-7
2e poète: reprend le 7-7 du premier poète et enchaîne avec un 5-7-5
3e poète reprend le 5-7-5 du 2e poète et enchaîne avec un 7-7
la chaîne continue jusqu’à ce/5-7-5 (2e poète), 5-7-5(reprise 2e poète)+7-7, etc.
Le haikai-renga c’est pareil mais avec des haikai, c’est à dire des hokku “comiques”. Dans certaines anthologie de Bashô tu peux retrouver des extraits de ces rencontres de poètes.
J’en parlerai de manière plus approfondie dans mon prochain article de blog dédié au haikai-renga.
Donc l’intérêt d’avoir une forme fixe 5-7-5, c’était de pouvoir composer les poèmes tranquillement dans son coin de jardin et se confectionner une anthologie personnelle de choix, afin de pouvoir dégainer ses poèmes au bon moment lors d’une de ces réunions.
La forme fixe rend les poèmes interchangeables tout en garantissant la cohérence de l’ensemble. La forme fixe est donc fondamentale !
La vraie différence entre la haikai et la haiku
Si le haikai était écrit dans le but de l’intégrer à un renga, sa forme fixe avait un sens et une utilité. Avec le haiku, forme apparue à l’époque Meiji (1868-1912), c’est un peu différent. Je me m’explique.
Masaoaka Shiki redécouvre les poèmes de Buson et tombe en amour devant cette si belle simplicité et cette expression de l’univers en si peu de mots. Il développe donc le haiku (contraction de haikai-hokku), mais si la forme ne change pas (5-7-5, kigo, césure) l’essence même du poème change profondément.2
Suivant l’exemple occidental, la conception de la figure du poète elle-même évolue. Ainsi un poète écrit pour lui-même : il écrit ses pensées, sa vison du monde. Il écrit seul et pour lui-même.3
C’est à partir de là que les poètes de la Nouvelle Tendance, regroupés autour de la revue Soun (Stratus) et du poète Ogiwara Seisensui (1884-1976), commencent à s’insurger contre les règles établies du haiku, trop strictes à leur goût, qui entravent la créativité et le liberté du poète.4Les raisons mêmes qui définissaient l’utilité de ces contraintes n’étant plus de mise, pourquoi se limiter avec un nombre fixe de syllabes ou un kigo devenu image figée aux références obsolètes et vide de sens?
Des auteurs comme Hôsai Ozaki (1885-1926) et Santoka Taneda (1882-1940) ont choisi cette nouvelle voie pour écrire des “haiku libres”. Se pose alors la question de la différence entre un haiku libre et un poème court? Parce que si plus rien ne définit le haiku libre comme un haiku, est-ce que c’est encore un haiku?
Qu’est-ce que tu en penses?
Et maintenant ?
Tu as maintenant deux solutions pour toi qui écrit des haiku sans (toujours) respecter la métrique 5-7-5.
tu écris des poèmes courts et en fait tu t’en fiche de l’appellation, de la “case” dans laquelle on veut te mettre, mais au moins maintenant tu sais où tu en es.
tu écris des haiku selon Hôsai et Santoka, ou la liberté d’expression et l’émotion du poète sont plus forts que les carcans de la règle classique. Tu écris tout simplement des haiku libres selon le courant de la Nouvelle Tendance.
Ce que j’essaye de te faire comprendre ici, c’est que tu as le choix, mais qu’il est intéressant de comprendre ce que l’on fait. J’ai vraiment tiqué quand j’ai réalisé que NATURELLEMENT un alexandrin de 14 syllabes n’est PAS un alexandrin (et va dire à un Français que tu t’en fiches du nombre de syllabes et que pour toi un alexandrin peut avoir 9, 13 ou 17 syllabes… pum, pum). Alors pourquoi on se permet de nier la forme inhérente du haiku? Parce qu’on ne sait pas d’où ces règles viennent, ni comment les utiliser vraiment.
Avec cet article, je souhaite t’inviter à te positionner, à faire un choix et à écrire un peu plus en conscience.
Un temps pour tout
Pour finir, il s’agit de nuancer (encore). Si tu es complétement débutant et que le seul fait d’écrire est une montagne pour toi, évidemment que tu ne doit pas te focaliser sur la difficulté de la métrique. A l’inverse, si tu écris des haiku depuis 10 ans et que tu ne respectes pas la métrique ou que tu mets 3 kigo dans un seul poème, je dirais que c’est le moment de sortir de ta zone de confort!
Il y a un temps pour tout. A toi de savoir où est-ce que tu te situe sur ton chemin d’écriture.
Voici ma vision de l’apprentissage de l’écriture de haiku comme je l’ai expérimentée moi-même, et comme je l’enseigne dans mes ateliers et formations:
ECRIRE. Sans compter, sans trop de contraintes, juste écris, prends le temps, fais-toi plaisir, prends y goût!
SE POSER DES QUESTIONS. Pourquoi c’est important d’avoir un kigo? à quoi il sert? et pourquoi on veut mettre une césure, d’ailleurs ça veut dire quoi “mot de césure”? et le nombre de syllabes, est-ce que c’est vraiment important? qu’est-ce qu’un bon haiku au final? Commence à te poser des questions et cherche les réponses pour t’aider à voir où tu veux allez dans ton écriture.
AJOUTER DES CONTRAINTES. Te confronter aux différentes contraintes pour t’aider à grandir, à t’améliorer, à faire des choix aussi. La contrainte mène toujours à la créativité si elle est prise comme un jeu.
ECRIRE DE BONS HAIKU! Tadaaaam. Ben oui, l’idée c’est que pour écrire de bons haiku il faut commencer quelques part, se poser des questions, choisir la direction ou tu veux aller et défendre ton point de vue d’auteur et de créateur.
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Notes
ORIGAS Jean-Jacques, Dictionnaire de littérature japonaise, Puf, 2000, p.333.
Ibid, p.169.
Ibid, p. 61.
CHENG Win fun, COLLET Hervé, Hosai, sous le ciel immense sans chapeau, Moundarren, 2007, p.3-4.
Quand je pense au lapin dans l’art japonais, le premier exemple qui me vient en tête c’est celui des fameux rouleaux peints du Chôjû jinbutsu giga (鳥獣人物戯画, lit. « Caricatures d’oiseaux et animaux humains ») ou Chōjū-giga (鳥獣戯画, lit. « Caricatures d’animaux »).
Il s’agit d’un ensemble de quatre rouleau peint ou emaki (絵巻), réalisé pour le temple Kôzan-ji à Kyôto au 12e siècle, aujourd’hui conservés dans les musées nationaux de Tokyo(pour les deux premiers rouleaux) et de Kyoto (pour les deux derniers rouleaux). Déclarée trésor national en 1952, cette œuvre marque un tournant dans la représentation d’animaux dans l’art japonais.
Caractéristiques
4 rouleaux peint emaki
le premier mesure 30 cm de haut x 11 m de long
succession d’images (sans texte) monochromes à l’encre de Chine
style otoko-e (un des mouvements du yamato-e), caractérisé par un travail au trait libre et dynamique à l’encre de Chine.
Description
Le premier de ces rouleaux peints met en scène de nombreux animaux, mais principalement des singes, des lapins et des grenouilles, dans des situations de la vie humaines. Tous sont humanisés soit par le port d’habits, soit par le fait de marcher sur deux pattes, soit encore avec l’aide d’expressions faciales typiquement humaines. Telles de véritables caricatures de moines bouddhistes de la fin de l’époque Heian, on les voit faire leurs ablutions, organiser des cérémonies, mais aussi se battre à grands coups de bâtons ou de flèches.
Le second rouleau représente des animaux réels ou légendaires.
Le troisième rouleau dépeint des jeux de moines et de laïcs ainsi que des animaux humanisés.
Le quatrième rouleau montre des personnages (religieux et laïcs) très caricaturés dans des scènes de jeux, de cérémonies bouddhiques, etc.
A noter que le style, la composition et jusqu’au sujet des rouleaux ne proposent pas une unité caractéristique. Cette succession d’images et de scènes n’était probablement pas conçue à l’origine comme un ensemble uni et homogène.
Et le lapin dans tout ça ?
Le lapin est l’un des animaux qui reviennent le plus souvent dans le Chōjū-giga (鳥獣戯画). Comme vu dans l’article précédent (Le lapin au Japon, entre zodiaque et folklore), le lapin possède une symbolique ambivalente et il est bien connu dans les contes pour son côté farceur.
Étant donné qu’on ne sait pas quelles intentions avaient les auteurs de ces rouleaux (critiques ouvertes des mœurs monastiques de l’époque? jeux libres sur la représentation anthropomorphique d’animaux familiers?) il est difficile d’interpréter chaque scène. Par contre il semble évident que le lapin revêt ici sa parure cocasse et farceuse : de tous les visages, ceux des lapins sont de loin les plus expressifs de ces rouleaux.
Si les grenouilles ont des expressions plutôt figées semblables à leurs caractéristiques physiques, les singes sont plus expressifs, mais les lapins proposent une gamme d’émotions subtiles et variées qui nous questionnent véritablement sur notre rapport à l’animal et à la nature.
Chōjū-giga (鳥獣戯画), rouleau 1, détails.
Comment lire un emaki ?
Comme toute œuvre japonaise, le sens de lecture va de droite à gauche. Le rouleau fermé par une cordelette présente le titre de l’œuvre dans un cartouche au verso. Pour lire un emaki, on se place sur une table et on déroule l’œuvre par portion. Un rouleau par définition pouvant rouler, on fera attention de placer un objet de part et d’autres de la table, ou préférer de se placer directement au sol, sur des tatamis. A la différence d’un livre où les pages sont clairement définies et fixes, on peut choisir quelle portion du rouleau on souhaite voir.
Il existe trois sortes de emaki : ceux qui présentent une alternance d’images et de texte, ceux où il n’y a que des images et ceux où il y a un texte en début et/ou en fin de rouleau.
La grande différence entre le emaki et le livre, est que le premier est toujours réalisé à la main alors que le second va connaître un essor rapide grâce à la mécanisation de sa production. Dès l’époque Edo (1603-1868) et le développement de l’imprimerie, on assiste à un véritable boom de la production de livre au détriment de l’art du emaki, par définition plus minutieux et donc plus cher.
Attribution & interprétation
Traditionnellement attribués au moine Toba Sôjô (1053-1140), on pense aujourd’hui qu’une succession d’artistes ont en réalité contribué à l’élaboration de cette œuvre. De la même manière, et comme déjà abordé plus haut, il est difficile de proposer une interprétation satisfaisante de ces rouleaux tant leur contenu est surprenant.
Certains ont vu dans le Chôjû giga le premier manga et l’origine de l’animation japonaise. Sans entrer dans les détails, je dirais qu’il est intéressant de voir cette œuvre dans son contexte et de l’admirer pour elle-même avant tout. Ce qui est certain, c’est l’effet que ces traits fluides et dynamiques provoquent en nous. C’est la joie que ces animaux personnifiés nous procurent grâce à ces scénettes de jeux et de farces. C’est également l’influence que ces images ont encore aujourd’hui vu qu’on les retrouve toujours dans l’espace publique (publicités), papeterie, vaisselle et autres objets du quotidien.
Et toi, tu as déjà vu les fameux lapins du Chôjû giga quelque part? Dis-moi tout en commentaire.
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Du 06 au 12 février 2023 j’ouvre également une boutique en ligne avec des produits de papeterie et d’illustration sur le thème “Le lapin dans la lune”. Viens y faire un tour!
Dans cet article tu trouveras le script de la vidéo de présentation du nouveau format du vendredi que je viens de poster sur insta et facebook.
Comme il s’agit de la toute première vidéo sous ce format, j’ai décidé d’inclure le script et la version française pour que tu puisses te faire une idée. Par la suite, tu trouveras en version gratuite la vidéo complète de chaque épisode sur ma chaine youtube (catégorie “shadowing”) et un extrait sur instagram et FB.
Si tu souhaites accéder au script détaillé en japonais, à la version française et à tout plein d’autres belles surprises que je t’ai concocté, je t’invite à t’inscrire à mon nouveau membership “アンドレアと練習しよう”. Plus de détails à venir courant de semaine prochaine \\ ( ^ _ ^ ) //
Je me réjouis de partager avec toi ma passion du japonais et de t’accompagner sur ton chemin d’apprentissage de cette magnifique langue.
Je suis toujours heureuse quand je vois le mont Fuji.
Sa forme unique, la neige qui saupoudre son sommet, les nuages qui s’accrochent à sa cime…
Chaque élément me renvoie aux célèbres estampes de Hokusai, mais aussi à l’œuvre de Dazai Osamu.
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Citation du jour
Dazai Osamu, “Cent vues du mont Fuji”, éd. Picquier, 1993, p.82
Faire le choix de la simplicité, du naturel – et donc de la brièveté limpide -, et transcrire mes impressions telles quelles: c’était ainsi pensais-je, qu’il me fallait écrire; et de ce point de vue-là, je voyais le mont Fuji sous un nouveau jour. L’image du Fuji, son “style”, avait peut-être la beauté de “l’expression simple” – et cette idée me réconciliait presque avec lui.
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Je te retrouve donc vendredi prochain pour le premier épisode complet de shadowing.
As-tu déjà remarqué à quel point le lapin est populaire dans l’art et la culture japonaise ?
Tu seras peut-être surpris d’apprendre que cette créature à fourrure a une place un peu spéciale dans le zodiaque. Le lapin est le 4e des 12 animaux qui composent le zodiaque japonais, et on dit qu’il est un symbole de bonne chance malgré l’ambivalence de son signe.
Dans cet article, nous allons examiner de plus près le lapin dans le zodiaque japonais et sa place dans le folklore populaire.
Le lapin dans les signes du zodiaque japonais
Le lapin est associé aux signes du zodiaque en tant que symbole de fertilité et de nouveaux départs. Cet animal qui a toujours été associé à la lune, notamment car c’est un animal qui dort le jour et vit la nuit. Il se fond également dans son environnement grâce à son pelage et peut ainsi apparaitre et disparaitre, comme la lune dernière les nuages. Le lapin est surtout associé au symbolisme du renouvellement perpétuel de la vie, du cycle des saisons où la lune joue un rôle important.1 Ainsi la vie et la mort, l’ombre et la lumière, l’abondance et le malheur sont des ambivalences indissociables de la figure du lapin.
Le côté positif du lapin est lié au fait que ce sont des animaux exceptionnellement fertiles en raison de leur taux de reproduction élevé. De la même manière, le lapin représente aussi l’abondance car il a besoin de beaucoup de ressources pour se reproduire. Enfin, ses longues oreilles ont également été utilisées symboliquement pour représenter la chance.
Malgré ces nombreux points positif, le lapin reste un animal lunaire et on ne saurait donc oublier son côté plus sombre. S’il apporte la bonne fortune, il peut aussi apporter la désolation. Ainsi le lapin, figure populaire et agraire, est passé maître dans les domaines de la paresse et de la boisson, deux habitudes connues menant à la faillite des commerces et instaurant le malheur dans les familles. Si sa fertilité peut mener à l’abondance, son pendant reste le gaspillage, la luxure et à la démesure.2
Pour revenir au signe de l’année du lapin, on retrouve cette ambivalence. L’année du lapin peut être très positive ou plutôt mauvais3 selon l’humeur de ton lapin. Placé entre l’année du tigre et celle du dragon, deux signes “féroces”, l’année du lapin fait office de balance, offrant un moment de répit entre deux signes aux forces supérieures et potentiellement chaotiques.
1. CHEVALIER Jean, GHEERBRANT Alain, Dictionnaire des symboles, éd. Robert Laffont et éd. Jupiter, Paris, 1982, p.571.
2. Ibid, p.573.
3. Idem.
Le lapin dans le folklore japonais: poétique et malicieux
Le lapin occupe une place particulière dans le folklore japonais, popularisée grâce à la célèbre légende du Lapin dans la lune :
Le légende dit qu’un dieu un jour décida de se rendre sur terre et de prendre l’apparence d’un homme affamé afin de se rendre compte de la capacité des animaux à se procurer de la nourriture. A sa vue, tous les animaux de la forêt lui apportèrent à manger: le singe alla chercher des fruits dans les arbres, l’ours alla pêcher du poisson, les oiseaux lui apportèrent vers et insectes. Seul le lapin était déconcerté. Il avait beau chercher, il ne voyait pas ce qu’il pourrait offrir à l’homme affamé. Alors, il fit un feu et se jeta dedans afin d’offrir sa chair elle-même en nourriture à l’homme. Le dieu tout ému décida de lui sauver la vie et pour le remercier, l’envoya vivre dans la Lune. C’est pour ça que depuis, il y a un lapin dans la lune.
Cette légende est souvent racontée au moment du solstice d’automne et de la fête Tsukimi 月見 (litt. “aller voir la lune”) lorsque l’on fabrique des mochi rond et blanc symbolisant la lune que l’on dégustera pendant les moments de contemplation dans la nuit automnale.
On retrouve le côté malicieux et du lapin notamment dans les contes folkloriques où il est connu pour jouer des tours aux humains et aux animaux, à l’instar du renard et du blaireau. Malgré les apparences ces personnages filous sont aussi généralement considérés comme des créatures de sagesse, comme des dieux déguisés. Si le côté espiègle du lapin est souvent mis en avant, il ne faut jamais sous-estimer son intelligence ! Aussi malicieux que le lapin puisse être, on lui attribue toujours le mérite de préserver l’équilibre entre les humains, la nature et notre environnement.
Le fait qu’il soit si rusé donne lieu à des histoires vraiment intéressantes dans la culture japonaise, souvent axées sur sa capacité à se montrer plus malin que tout le monde, y compris les dieux ou d’autres éléments surnaturels, ce qui lui donne une aura vraiment spéciale dans le folklore japonais.
Pour exemple je t’invite à découvrir le conte “Pourquoi le lapin n’a pas de queue” que tu trouveras dans le fascinant ouvrage de Maurice COYAUD, Aux origines du monde, contes et légendes du Japon, éd. Flies France, Paris, 2001, p. 61-70.
……
Le mois prochain je te parlerai du Chōjū-giga (鳥獣戯画, lit. « Caricatures d’animaux »), rouleau peint du XIIe où la figure du lapin est particulièrement présente.
En cette période festive je t’offre un ebook pour prendre le temps de revenir sur ton écriture et tes mots 2022.
Quelles ont été tes inspirations?
Quels sont les kigo qui t’ont émerveillé?
Quels sont tes défis pour 2023 dans le domaine du haiku?
Bref, voici mes réponses.
Peut-être qu’elles vont t’inspirer? N’hésite pas à me partager tes réponses par mail ou en commentaire.
Tu peux aussi utiliser les templates de story insta pour partager tes favoris 2022… n’oublie pas de me taguer @lejaponavecandrea.
Mes 6 haiku préférés écrits en 2022
Mes kigo préférés
Mes inspirations en 2022
Pour moi 2022 c’est…
Mes défis haiku en 2023
Rendez-vous en janvier pour de nouvelles aventures poétiques!
…..
Si tu souhaites recevoir le ebook cadeau, inscris-toi à la newsletter bimensuelle “Haiku & littérature japonaise. Le lien pour accéder au cadeau est dans la 2e newsletter de décembre (sortie le 24 décembre 2022).
S’il avait passé ainsi une première nuit avec une inconnue, la matinée aurait été désagréable. Il n’aurait pu ressentir cette affection qui le liait à Utako.
Pourtant, il ne pouvait lui en parler.
-Quand on s’est séparé, il y a longtemps, j’ai désespéré en pensant que la rupture était définitive, mais il est resté entre nous quelques chose d’important. D’important, et qu’il nous faut conserver précieusement.
– Tu parles comme une énigme.
-A résoudre?… ou pas?…, fit Utako en hochant la tête, comme s’interrogeant elle-même,
-Un couple autrefois séparé qui se retrouve: c’est une grande chance que cela ne se termine pas en déferlement de haine, tu ne crois pas?
-Tu as raison.
C’est par un bus qui partait peu après quatorze heures qu’ils descendirent vers Odawara. Et c’est depuis la fenêtre du train qui les reconduisait à Tokyo, en sens inverse de la veille, qu’ils contemplèrent la Fuji sous sa première neige.*
…
Une douces série de nouvelles mettant à l’honneur les relations humaines et l’introspection sur sa propre vie. En couple, en famille ou encore au seuil de la mort, chaque personnage revisite des tranches de passé parfois douloureux, mettant en avant l’ambivalence de la Vie : rien n’est tout blanc ou tout noir.
Nos choix se répercutent à travers le temps pour donner saveurs et couleurs à chaque épisode qui vient former l’ensemble d’une vie. A nous de définir la couleur de notre avenir!
Au plaisir de lire tes commentaires!
………….
* KAWABATA Yasunari, “Première neige sur le mont Fuji,”, éd. Albin Michel, collection Le livre de Poche, Paris, 1994, p.42.
Voici une petite vidéo décontractée en cette fin d’année pour te partager mes go to dès qu’il s’agit de livres autour du haiku.
Si tu me suis depuis un moment, certains ouvrages ne te surprendront pas… pour les autres c’est cadeau!
Je précise que dans le domaine des livres sur le thème du haiku il y en a pour tous les goûts et ici je te partage mes coups de cœur ainsi que les atouts et les inconvénients de chaque édition à mon sens.
Personnellement, je suis assez critique car j’écris des haiku, donc au-delà du plaisir de la lecture ce sont aussi des outils de travail. Dans la même idée, j’aime la langue japonaise (que je parle) donc pouvoir lire les haiku grâce à une transcription sans avoir besoin de chercher les kanji non simplifiés ou calligraphiés est un plus…
Bref, selon tes goûts et tes besoins, tu sauras trouver les ouvrages qui résonnent en toi… ou pas.
Si tu as déjà une bibliothèque personnelle full de livre sur le haiku, n’hésite pas à partager en commentaire ta liste de favoris. Et si tu est novice, vas te perdre dans les rayons de la bibliothèque côté littérature japonaise ou poésie ou encore dans ta librairie préférée et fais ta propre sélection!
J’ai hâte de découvrir tes goûts en matière d’édition poétique \\ (^ – ^) //
Bibliographie complète (par ordre d’apparition) :
CHENG Win fun & COLLET Hervé (trad. du japonais par), On se les gèle! haikus d’hiver, éditions Moundarren, 1990.
CHENG Win fun & COLLET Hervé (trad. du japonais par), Ah! le printemps, le printemps ah!, ah! le printemps, haikus de printemps, éditions Moundarren, 1991.
KERVERN Alain, Grand Almanach Poésie Japonais, éditions Folle Avoine, 1992. 5 volumes:
Livre I, Matin de neige, le Nouvel An
Livre II, Le réveil de la loutre, le printemps
Livre III, La tisserande et le bouvier, l’été
Livre IV, A l’ouest blanchit la lune, l’automne
Livre V, Le vent du nord, l’hiver
CHIPOT Dominique, KEMMOKU Makoto (trad. et prés. par), L’intégrale des haïkus: Bashô, seigneur ermite, éd. Points, 2014.
CHIPOT Dominique, KEMMOKU Makoto (trad. et prés. par), Anthologie, du rouge aux lèvres, Haijin japonaises, éd. La Table ronde, 2008.